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Interview exclusive

Champion de France National 500

Robert Aguirre
Q : Quels sont vos premiers contacts avec la moto ?
R : J’ai eu la chance de connaître le début du motocross après la guerre avec des motos allemandes ou anglaises : NSU, Matchless, Royal Enfield. Mon père était forgeron et je me souviens que j’avais du quitter le cours complémentaire car les soldats allemands occupaient la classe à Auterive. Donc j’ai travaillé à l’atelier de forge avec mon père. J’avais 15 ans. Il avait une moto. J’en faisais donc beaucoup, je faisais des acrobaties ! Je me suis mis à réparer les motos des copains puis à exercer une petite activité de réparation et de vente de motos allemandes et américaines.

Du coup, j’avais un peu d’argent et j’ai ouvert un magasin de moto.

Q : Quelle est votre première course ?
R : Un ami avait une moto et il me l’a prêté. C’était à Jolimont un quartier de Toulouse. Il y avait une démonstration avec des pilotes qui venaient de Paris. Ils en faisaient depuis longtemps. Les organisateurs m’avaient dit « vous allez rouler et on verra vos temps ». Finalement j’ai tourné comme eux donc j’ai pu participer à la course !

Puis j’ai roulé dans l’Hérault et dans l’Aude,à Castelnaudary. J’ai du y terminer second pour une de mes premières courses.

Bien après, j’étais devenu un bon mécano et j’étais un peu spécialiste pour gonfler les motos. J’avais une fraiseuse pour les faire évoluer et du coup je gagnais tous les dimanches.

Q : Quel est votre palmarès ?
R : Je suis champion de France National 500 en 1963 et aussi champion des Pyrénées de patins à roulettes !

Q : Racontez-moi ce titre en 1963 ?
R : En fait tout a commencé en 1962, quand j’ai rencontré un journaliste de Moto Revue, le bien connu RC.Delefosse. Il m’a reproché de ne gagner que les motocross de régionaux. Je lui ai répondu, eh bien l’année prochaine, je fais le championnat National ! En 1962, j’ai terminé 17 fois premier !

Je me suis rendu aux qualifications à Clermont-Ferrand. Il fallait être dans les dix premiers pour être qualifié. J’ai fait ma course et j’ai terminé troisième. Puis la deuxième épreuve de sélection était dans un petit village à côté de Rouen, à Ste Austreberthe. Il avait plu. Nous étions trente, j’ai réalisé une course tranquille à la neuvième place. Puis j’ai gagné toutes les épreuves du championnat ! Nous étions plus de 100 au départ de ce championnat avec les épreuves de qualification et j’en suis sorti premier !

Q : Puis ce fut la catégorie inter ?
R : Oui. C’était la règle de l’époque. Les cinq premiers Nationaux montaient et remplaçaient les cinq derniers Inters. Je me suis classé à des places honorables en Inter, 4è, 5è et même 3è une fois à St Quentin.

Par la suite j’ai baissé un peu le pied. J’avais dit à des amis que je ne ferais que quelques courses, mais finalement une roue de tracteur m’a roulé dessus. Je n’ai pas pu courir pendant trois mois. J’ai prévenu la FFM, mais ils m’ont quand même accordé la licence inter.

Puis mon affaire a bien évolué. J’avais deux ouvriers et Renault motoculture m’a proposé d’être agent. L’agriculture était en pleine évolution dans la région de Toulouse et j’ai accepté.

Ensuite Renault m’a proposé de vendre des voitures. J’ai dit d’accord. Je vendais plus de quatre-vingts voitures par an. C’était des 4CV. A ce moment-là, je ne participais plus qu’aux cross régionaux avec ma licence d’extra national.

Q : Avez-vous été pilote officiel ?
R : Non, mais je connaissais bien les frères Rickman, j’étais ami avec eux. Leslie Archer m’avait invité chez lui et nous étions allés les voir. Ils étaient en train de faire un moteur avec un carter BSA. Ils utilisaient déjà le moteur Weslake. Ils m’ont dit, on la fait à notre idée et on te l’envoie. Je l’ai reçue. Elle était formidable, elle était un cran au-dessus des autres.

Q : Avez-vous roulé à l’étranger ?
R : Pas beaucoup. J’ai roulé une dizaine de fois en Algérie. Je partais le vendredi et je revenais le lundi matin. J’ai eu l’occasion de rouler une fois en Yougoslavie, mais ça ne s’est pas fait.

Q : Quels pilotes vous ont impressionnés ?
R : Rolf Tibblin, Sten Lundin, Albert Courajeod et Fritz Beltzelbacher. Ce dernier avait un fin pilotage. Je me souviens d’une course, j’étais parti devant et finalement il a réussi à se faufiler pour me doubler ! Les étrangers étaient durs à battre, ils n’étaient pas comme nous, ils roulaient en Grand Prix. Les Anglais et les Suédois étaient très dangereux !

Q : Quels étaient vos points forts ?
R : Ma condition physique ! J’ai toujours aimé le sport et je ne buvais pas et ne fumais pas ! Je pratiquais la culture physique, la gym et le patin à roulettes. Souvenez-vous, j’ai été champion des Pyrénées de patins. J’en faisais 20 km ! Les manches étaient longues à l’époque et avec ma condition physique, à partir de la trentième minute, je remontais mes adversaires !

Q : Quels étaient vos circuits préférés ?
R : Plus c’était difficile techniquement, plus j’aimais ! Je parcourais le terrain à pied une ou deux fois et je repérais les trajectoires.

Q : Quel est votre meilleur souvenir ?
R : A Tarare. C’était un cross inter et il y avait toutes les vedettes : Tibblin et Lundin qui étaient champions du Monde, les Suisses, Les Anglais…Nous étions trente au départ ! Je termine deuxième en première manche, puis dans troisième dans les deux suivantes pour me retrouver sur le podium aux côtés de Tibblin et Lundin !! Et financièrement ce fut une bonne opération car c’était un gros cross inter.

Q : Avez-vous une anecdote à nous raconter ?
R : Non, je retiens plutôt la bonne camaraderie qui régnait. On arrivait la veille des courses, on campait, on était plus d’une quinzaine à diner ensemble, on s’amusait, on était copains. Tibblin, Lundin, Betzelbacher sont venus chez moi ! Parfois ils sont restés une semaine, on réparait les motos. J’étais copain avec Steve Mc Queen et Mc Carty aussi.

On est devenus amis avec Guy Bertrand, qui était un crack, après l’avoir battu dans les 3 manches, lors d’une course !

Je me souviens aussi, j’ai initié au motocross JP.Clanet et S.Bacou ! Il était encore à l’école et et ses parent l’emmenait chez moi avec sa 250 BSA !

Je me souviens d’un dimanche d’après course, j’avais dit à des copains de descendre de 50 km un peu plus au sud vers Limoges alors qu’eux devaient remonter vers Paris. En fait c’était pour manger dans un bon petit resto des écrevisses !

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Palmarès :
Champion de France National 500 1963
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[ Photos : Archives Robert Aguirre avec son aimable autorisation ]
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