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Interview exclusive

Robert Méras à Rouen

Motocross History : Comment êtes-vous arrivé dans le monde de la moto ?

Robert Méras (RM) : Mon père était marchand de vélos, de machines à coudre, de mobylettes et il vendait aussi quelques motos. C'était dans un petit village de 3 000 habitants. Je voyais tout le temps les motos que mon père vendait, ça m'attirait. Mon père avait un mécano qui était pilote de rallye moto. Un jour, bien des années plus tard, avec mon frère nous avons trouvé dans le grenier des plaques de moto. Rondes pas ovales. Nous nous sommes dit que cela devait être des plaques de motos de courses. C'est comme cela que la compétition m'a intéressé.

Comment se sont déroulés vos débuts à moto ?
RM : A 17 ans, j'avais acheté une Automoto de route. Puis mon frère avait racheté la Monet-Goyon 232 de l'ancien mécano de mon père. Je l'avais transformé en moto de cross. Pour la fourche, j'avais récupéré un amortisseur de traction avant, qui retenait la fourche comme elle n'avait pas d'huile !

Et votre première course ?
RM : J'avais 17 ans, j'avais demandé une licence et on me l'avait accordé alors que je n'étais pas majeur. C'était à Marcigny. Je m'étais bien débrouillé, mais je ne me souviens pas du classement. Puis je suis devenu Champion de Bourgogne.

Avez-vous roulé en Grand-Prix ?
RM : Oui. le Grand Prix de France, des Pays-Bas, d'Angleterre et de Suisse à Wohlen. C'est lors des Grands Prix que j'ai appris à rouler dans la boue.

Vous avez participé au Motocross des Nations en 1963, comment l'avez-vous appris ?
RM : C'est un journaliste de la Manche qui connaissait bien Mr Lesueur de la FFM. Il m'a dit : "tu vas être sélectionné pour le Motocross des Nations".

Quels sont vos souvenirs des Motocross des Nations ?
RM : Je me souviens que nous voyagions ensemble en se suivant et que nous étions dans de beaux hôtels. Des hôtels avec de la moquette de cinq cm d'épaisseur ! En Angleterre, le soir de notre arrivée, nous étions allés sur le terrain et mes copains, G.Bertrand, A.Chuchart, R.Julienne et René Klym m'avaient montré au pied d'une falaise, à 1,20 mètre du sol, les traces de guidon sur la falaise là où les pilotes viraient. Ca m'avait impressionné ! On partait à l'élastique. Il y avait eu trois faux départ ! Lors d'un départ, j'étais bien parti puis j'ai tapé une moto et on s'est retrouvé plusieurs pilotes au sol. Puis j'ai vu les autres motos arriver sur moi. Dans ma tête je me suis dit : " je veux retourner au parc coureur ! je ne veux pas rester là !" Je termine premier Français à la quinzième place.
En 1965 à Namur, j'étais mal parti mais j'avais remonté douze et huit places dans chacune des manches. Enfin en 1966, en France à Rémalard, je termine 30è et 22è. Il y avaient de sacrés pilotes !



L'Equipe de France à Rémalard, R.Méras avec le n°52

Quel fut votre plus lointain déplacement ?
RM : En Italie. Et aussi en Yougoslavie, car avec le club de Givry, nous avions un échange.

Revenons en France, quand commencez-vous à rouler en Championnat de France ?
RM : En 1960. J'avais acheté la Matchless de Knutti, Je roulais déjà mieux. Je me souviens à Macon, je suivais des pilotes comme Knutti et Faivre. Mais d'autres pilotes avaient déjà des Greeves et des Jawa, j'ai peut-être perdu une année avec la Matchless. En 1961 et 1962, je suis au service militaire. En 1963 j'ai acheté la 500 Gold Star à Jean Cros. J'ai participé au 500 National où j'ai terminé cinquième. Ce qui permettait de monter en Inter l'année d'après. Mais je suis peut-être monté dans la catégorie des grands un peu trop tôt car il y avait un sacré niveau. Je ne marque pas de points au classement, mais je termine septième de la première épreuve. Cette année-là, j'ai une Matchless-Rickman et je roule sur cette marque encore en 1965 et 1966. Je termine douzième inter cette année-là. Ensuite, en 1967, je roule CZ et termine sur le podium en fin d'année du championnat Inter. Puis sur Montesa, mais elle ne m'a pas plu. Il n'y avait que Jacky Porte qui arrivait à la piloter ! Enfin, j'ai fini sur CZ en 1969 et 1970 avec une huitième et dix-neuvième places finales. Ensuite j'ai arrêté. Avec mon frère nous avons repris le commerce de mon père : Méras Moto.

Vous terminez troisième du championnat Inter 500cc en 1967, auriez-vous pu gagner ce titre ?
RM : Non, je n'y ai pas assez cru sans doute. J'avais un "coach", mon frère, qui ne me poussait pas !! Un jour ça vous sourit une fois, il faut saisir sa chance, après elle passe.

Troisième, c'est sur le podium !
RM : Oui c'est bien. surtout que j'avais gagné une poule, car cette année-là le championnat était divisé en deux poules et les meilleurs se retrouvaient en un championnat final.

Quels étaient vos plus sérieux adversaires ?
RM : Les gars qui roulaient comme moi, René Dugas, Rémy Julienne, Jean Cros. Parce que les Hazianis, Chuchart, Bertrand, Barbara, ils étaient devant !!

Comment vous déplaciez-vous sur les courses ?
RM : En voiture et remorque. Après j'ai acheté une commerciale et j'avais bricolé un système : je démontais la roue avant de la moto. et cela me faisait comme une échelle, je mettais la moto en diagonale.

Quels étaient vos circuits favoris ?
RM : Bellême.

Quels étaient vos forces ?
RM : J'étais très résistant. C'est pour cela d'ailleurs que Marcel Seery m'a sélectionné pour Rémalard. En fait, lors de ma première participation, je croyais qu'au Motocross des Nations il y avait trois manches ! En fait il y en avait deux, mais plus longues que les manches classiques, donc je tenais la distance !



Commentaire de Marcel Seery lors de sa sélection pour le Motocross des Nations

Avez-vous vécu de votre passion ?
RM : Oui un peu, j'ai connu la fin de la bonne époque. J'avais 500 FRF de l'époque (76€) comme prime de départ. A la fin des courses on nous donnait une enveloppe. et puis le soir, le club organisait un bon gueuleton ! On faisait des noubas !

[photos : Alain la photo et l'office du tourisme du perche rémalardais www.percheremalardais.fr avec leur aimable autorisation